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Où est la cassette ? Fin !

Publié le 29 Décembre 2011 par beau bruit in The small world daisychain... ...tape project

Il y a quelques mois sur ce site/blog, vous avez peut-être assisté au feuilleton du mystérieux voyage international d'une cassette peinturlurée. Quelle était l'idée, là, derrière et quel est le son, là, dedans ? Il est grand temps de lever le voile.

 

La cassette envoyée au départ n'était pas vierge. J'avais récupéré une vieille cassette déjà utilisé et l'avais "effacée" en enregistrant une ambiance sur toute la face A. Cette ambiance commence la bande, réapparaît presque entre chaque intervention et, de même, conclut le voyage, comme un fil rouge.

 

Tout a commencé par l'envie de participer à une rencontre internationale d'art postal, pas n'importe laquelle, à deux pas de chez moi. Un ami, André Robèr, avait lancé un appel à projets pour la deuxième année consécutive, cette fois sur le thème des langues : “Parle ta langue, montre ta langue !”. Mais première question : comment participer honorablement à un projet d'art postal quand on habite le même village ? En glissant bêtement son enveloppe dans la petite boîte jaune ? Encore plus bête que de la lui apporter en main propre… Non, il fallait que ça voyage. Et pour que ça voyage et pour qu'on entende des langues, il fallait des complices loin, ailleurs, dans le monde entier même. Des complices qui par conséquent seraient invités à apporter leur petite pierre à ma contribution. Deuxième question : comment participer honorablement à un projet d'art postal alors que mon support d'expression à moi ce n'est pas le papier ? Comment faire circuler du son et du son qu'on peut modifier ? Alors qu'aujourd'hui on utilise tout le temps le mp3 et internet (moi le premier), que reste-t-il des supports audio ? Le CD ? trop fermé. Le MiniDisc ? trop fragile, pas assez fiable et déjà plus si répandu. Il fallait remonter dans le temps… La bonne vieille cassette ? Voilà un support que tout le monde sait utiliser et pour lequel on peut encore trouver l'enregistreur adéquat. La suite me montrera que ce n'était pas totalement vrai, un des participants, David, ayant fait des pieds et des mains pour dénicher et faire fonctionner un magnétophone, en vain.

 

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La cassette avec ses deux trous évoque un visage dans lequel la bande pourrait être la langue.

 

Le principe et la consigne étaient simples. J'enregistre la phrase “Ma langue parle ma langue” dans ma langue maternelle, puis j'envoie la cassette à un.e ami.e qui va faire de même à la suite de la bande, faire éventuellement entendre les sons autour, et l'envoyer au suivant. Le dernier complice la ferait parvenir à André qui, à deux pas de chez moi, ignorait tout de mon projet. J'imaginais sa surprise et voyais déjà la pièce originale trôner au milieu de son exposition d'art postal, graphique pour l'essentiel. Partie de France, la cassette lancée vers l'Est aura parcouru Taiwan, le Japon, survolé l'Océan Pacifique pour atterrir au Canada, puis les États-Unis d'Amérique, traversé l'Atlantique direction le Portugal, puis l'Espagne, l'Italie, la Turquie, l'Autriche, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Écosse. Elle sera passée entre les mains de locuteurs qui parlent français, chinois, japonais, québécois, anglo-américain, portugais, valencien, italien, turc, tchèque, allemand, néerlandais d'un dialecte de Maastricht et anglo-écossais.

 

The small world daisychain mail tongue tape trip

Il faut ajouter qu'après Ürzig, la cassette ne quitte pas tout de suite l'Allemagne. Elle est envoyée à Berlin où se trouve Harold qui l'emportera avec lui en train à Amsterdam.

 

Plus tard, André m'a dit : “Dans l'art postal, il faut t'y prendre un an à l'avance”. En effet, démarrer un 14 février, vouloir couvrir une douzaine de destinations, pour une échéance au 20 juillet, ça n'était pas raisonnable. La cassette arrivera finalement début septembre, une dizaine de jours après la clôture de l'exposition. Mais il faut signaler qu'elle a connu quelques déboires en chemin… Elle arrive à Tokyo deux jours avant le tremblement de terre, elle est là-bas lors des explosions de Fukushima. C'est pourquoi elle ne repartira pas du Japon avant un moment, mais elle le quittera porteuse, pour moi, d'une forte symbolique marquée par mes échanges avec Tetsuo. Après ce lent démarrage inimaginable, elle suit son petit bonhomme de chemin sans encombre jusqu'à l'avant-dernière étape totalement chaotique. Envoyée d'Amsterdam par Harold (qui raconte lui-même sa version de l'histoire dans un billet passionnant de son blog), elle est probablement suspectée de contenir des substances illicites puisque interceptée par la douane française lors de son transit à l'aéroport Charles De Gaulle. Zoë reçoit une enveloppe ironiquement vide et je pense ne jamais revoir la cassette. Je savais que ce projet était risqué, et osé (chaque participant acceptant de prendre en charge les coûts d'envoi), je m'attendais pourtant à ce que la cassette soit cassée lors des transports ou bien qu'elle soit irrémédiablement perdue. Mais qu'elle soit “portée disparue” était insupportable… C'est alors qu'elle réapparait dix jours plus tard au Canada chez Marjolaine, envoyée par erreur par les douaniers, au hasard d'une des adresses qu'ils auront trouvée dans les multiples traces de ses destinations précédentes. Elle aura donc traversé l'Atlantique une deuxième fois, elle le traversera une troisième fois pour continuer sa course normale, et ce délai imprévu lui coûtera sa présence au sein de l'exposition d'art postal.

 

Mes premiers pas dans l'art postal ont sans doute été un peu trop ambitieux, mais je suis heureux que la cassette ait enfin atterri dans les mains d'André. Mes pensées se portent vers les complices du monde entier qui ont rendu l'expérience possible : Yen-Ting Hsu, Tetsuo Kogawa, Marjolaine Bourdua, David Santori, Ricardo Reis, Laura Romero, Carola Haupt, Deniz Kologlu, Anna Soucek, Knut Aufermann, Harold Schellinx, Zoë Irvine. > diaporama >

 

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Montre ta langue, parle ta langue !

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